Soir d’automne, le 25 novembre 2023. Forêt de Belin-Béliet.
Au bord des rives de l’Eyre, le calme devient âpre, le silence se vêtit d’argent. L’eau y croupit, les corps végétant suffoquent. Un poison se répand, éclatant, qu’on nomme « hydrocarbures ». Je m’enivre de sa beauté qui, je le sens, je le sais, n’est que superficielle.
Je m’apprête à croire que mon rôle est déjà joué dans cette catastrophe. Je m’y reconnais, dans ce goût notable pour les choses qui brillent, qui fait de nous des humains. Ce phénomène m’attire dans mon humanité la plus entière, perverse et désireuse du rare. Je suis persuadé d’une chose : en ces terres sommeille une anomalie profonde que je ne saurais résoudre.
Silver lining pointe cette « bordure d’argent », métaphore de la pollution aux hydrocarbures. Ce sont des fuites aux reflets argentés et irisés, surgissant de façon sporadique et isolée dans les Landes, où se trouve le plus grand gisement de pétrole de France métropolitaine.
Ici, c’est l’industrie pétrolière qui s’expose à ciel ouvert. Les cas de fuites de pipelines, mêlées à des phénomènes de migration naturelle, prennent des allures de légendes rurales. Cette tragédie moderne fait ressurgir l’inconstance des paysages et la vulnérabilité des écosystèmes face aux dérèglements causés par l’activité humaine.
Ce travail se rapproche du témoignage personnel et sensible et explore un romantisme au fond poétique et documentaire. Le doute qui plane sur l’origine de ces dépôts plonge le regard dans une contemplation vaine et pernicieuse. La beauté toxique envoûte avant de laisser place à une éco-anxiété pesante. Dans cette perte de repères, comment relativiser face à cette catastrophe ?
Empreint du drame de John Milton Comus, les récits se croisent et dévoilent une quête intérieure déchirée entre lucidité et déraison pour se déjouer des apparences et de la corruption.